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Ma blouse, mon stétho et mes chaussures
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9 avril 2008

Fixe...

Toutes sortes de choses peuvent être fixes.

Ainsi, nous utilisons un téléphone fixe pour joindre des amis, nous nous tenons tant bien que mal à la barre fixe au centre des allées du métro, les danseuses et danseurs s'entraînent à la barre fixe, nous fixons des cadres aux murs, nous voulons être fixés à propos de tas de sujets si diverses soient ils, nous nous fixons en un lieu géographiquement défini, nous nous fixons dans un emploi, nous souhaitons un salaire fixe, nous nous fixons dans des relations amicales, familiales, sentimentales. L'Homme est en proie à une boulimie de fixité, de fixation.

Il ne fait aucun doute que l'Homme a besoin d'être fixé, d'être rassuré par cette idée récurrente et obsessionnelle qu'est sa fixation dans la société. Est-ce pour exister? Est-ce pour se sentir respecté?

L'humain existe en tant que tel grâce à ses différences avec les animaux et les végétaux, l'humain est doué d'une conscience, l'humain pense, réfléchit, est tourmenté. Néanmoins, le "je pense donc je suis" ne suffit pas à l'humain, il lui faut se reconnaître dans les yeux de ses semblables. Il n'est rien sans autrui, cet autre - croisé au hasard des méandres de la vie - se transforme soudain en un miroir, en une vue en négatif de sa petite personne. Dès lors, le simple humain fait réellement partie du genre humain puisqu'il est reconnu comme y appartenant par cet inconnu au bord de la route du temps. C'est pour cela qu'il a besoin d'être fixe, qu'il se conduit comme un maniaque de la fixité, comment pourrait-il se reconnaître dans les yeux d'un autre si il ne parvient pas à cet idéal de fixité, de rigidité humaine?
Cet évitement volontaire, quoique parfois inconscient, de la profonde nature humaine, ce jeu de miroir intemporel ne serait-il pas synonyme de facilité plutôt que d'humanité?

Dans la société actuelle, nous nous devons d'avoir une situation bien définie de façon à être respectés par nos congénères. Prenons l'exemple fictif d'un groupe d'amis, ayant aux alentours de 25 ans, ils se retrouvent autour d'un verre. L'un d'eux n'est pas fixé dans sa vie sentimentale, il collectionne les conquêtes, il s'amuse, il ne trouve pas chaussures à son pied puisqu'il ne le souhaite pas encore; ses amis vont dès lors faire pression pour qu'il se pose enfin, pour qu'il cesse de faire le jeune con, pour qu'il atteigne enfin cette fixité si chère à leurs yeux, il n'est pas tout à fait respecté en tant qu'être humain à part entière. L'une d'elle ne parvient pas à déceler sa voie professionnelle, elle papillonne de job en job, de faculté en école et d'école en faculté; ses amis vont la sommer de faire le nécessaire pour acquérir un vrai métier, un emploi fixe avec un salaire fixe, un travail respectable. Les exemples sont multiples, je vous laisse continuer au gré de vos envies, de vos situations...

Que dire des résistants à ce manège fixe? A mon sens, ils sont animés d'une humanité quasi intouchable, cette humanité indéfectible les pourvoit d'une force admirable, d'une capacité de contempler le monde pour ce qu'il est, de faire voyager leur esprit au départ de simples mots, de simples pas, de simples tonalités de téléphone, de simples regards, de simples inconnus, de simples gouttes de pluie ruisselant sur leur peau, de simples larmes émanées de la rosée du matin, de simples nuages empourprés par le soleil couchant... La mouvance, c'est peut-être ça être humain...

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Commentaires
T
... je suis d'accord avec tes observations, ton diagnostic, mais pas forcément sur les conclusions.<br /> <br /> Disons que je n'exclus pas les personnes ayant besoin d'un minimum de "fixité" (sans justement que ça vire à la fixation ;o) ) de la capacité de voir le monde tel qu'il est par exemple. On est pas forcément aveuglé ou limité par le fait d'avoir des repères fixes, ça peut au contraire servir de camp de base pour se sentir suffisamment fort pour aller découvrir le reste du monde.<br /> <br /> Certes l'homme est un zoon logistikon, qui a une autonomie de pensée et d'action (dont, je suis d'accord avec toi, il ne sert parfois pas assez, par peur très souvent), mais c'est aussi un animal social qui a a minima besoin des autres pour se construire, et de fondations sur lesquelles bâtir.<br /> <br /> Cela dit, on n'est pas obligé de bâtir, on peut choisir (ou préférer sans avoir besoin de le choisir consciemment) de vivre en nomade... mais même les nomades voyagent en groupe, et trouvent là leur point fixe.<br /> <br /> A+ !
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